Après Dieu, et Lord Balfour : Trump promet Jérusalem à Israël (1)

« Celui qui m’a changé en exilé m’a changé en bombe. Je sais que je vais mourir, je sais que je livre une bataille perdue au présent, car elle est d’avenir. Et je sais que la Palestine – sur la carte – est loin. Et je sais que vous avez oublié mon nom dont vous avez falsifié la traduction. Et tout cela je le sais. Et c’est pourquoi je porte Palestine sur vos boulevards, dans vos maisons, dans votre chambre à coucher. » Mahmoud Darwich

Une nouvelle de plus qui plonge les Palestiniens dans le désarroi et la communauté des hommes épris de justice scandalisés par l’injustice et les faits du prince. Après Dieu qui parle de Terre promise « ardh moukadassa : Terre sacrée » pas uniquement pour Banou Israël, après Lord Balfour qui promet un Home, pour la troisième fois, les Israéliens se voient remettre les clés d’une ville trois fois saintes. Cette décision dangereuse du président américain de transférer l’ambassade des Etats Unis de Tel Aviv à Jérusalem qu’il déclare être la capitale d’Israël est dangereuse à plus d’un titre. Elle consacre à Dieu ne plaise le droit de la force Dans cette déclaration Trump ne parle nullement de Jérusalem Ouest, pour lui la Jérusalem est depuis 1967 n’existe pas. Cette violation du droit international Trump n’en a cure.



La Création de l’Etat d’Israël

Lors du partage de la Palestine, on s’est toujours posé la question pourquoi les juifs minoritaires ont été avantagés par rapport aux Palestiniens. La publication suivante apporte une réponse : « 70 ans après l’adoption par l’Assemblée générale des Nations Unies du plan de partage de la terre de Palestine le 29 novembre 1947, un chercheur israélien a jeté la lumière sur le diplomate suédois pro-sioniste oublié. Le Dr Elad Ben-Dror, du département des études moyen-orientales de l’université Bar-Ilan, s’est rendu en Suède pour voir ce qu’il pourrait apprendre sur Mohn, le représentant adjoint de la Suède à la Commission ad hoc chargée de la question palestinienne (UNSCOP), établie en 1947. À l’Université d’Uppsala en Suède, Ben-Dror a trouvé le journal personnel de Mohn. “ J’ai essayé de réconcilier des idées inconciliables: l’espoir d’une coopération judéo-arabe et la peur de l’animosité judéo-arabe ”, écrit Mohn dans le journal. “ Si les parties veulent vivre en paix, cela pourrait arriver avec mon plan de Partition ”, a-t-il expliqué. “ S’ils veulent se séparer et se tourner les uns les autres – il y a aussi des possibilités théoriques pour cela. ” »

Selon la proposition de Mohn, le pays est divisé en sept parties : la région de Jérusalem, qui devait être placée sous contrôle international, et six régions triangulaires – trois pour l’État juif et trois pour l’État arabe. Tous ces territoires se touchaient par leurs coins de manière à préserver la contiguïté territoriale de chacun des deux États.

Ces « points d’intersection » permettraient de se déplacer sans friction dans les zones assignées à chacun des États. Du point de vue des juifs, l’avantage de la carte de Mohn était clair : elle donnait au futur État juif 62% du territoire, même si la population palestinienne était deux fois plus nombreuse que celle des Juifs. (…), Mohn a dit de lui-même qu’il n’était pas particulièrement sympathique envers les aspirations nationales des Arabes, auxquelles il avait été exposé pendant son service diplomatique au Moyen-Orient pendant la Seconde Guerre mondiale. Il parlait de la terre de Palestine comme « la terre sainte » (…) « J’étais là pour sauver la situation », a-t-il noté, et a raconté comment il s’est retrouvé tout seul jusqu’à très tard dans la nuit pour donner à sa « carte des taches » une forme plus lisible.

« Seul, il a déterminé le sort de villages et des villes », dit Ben-Dror, s’appuyant sur le témoignage de contemporains de Mohn. L’un deux, David Horowitz, l’émissaire de l’Agence juive à l’ONU, a écrit que Mohn était le personne « qui, plus que quiconque, a établi les frontières du futur État hébreu ». La vision pro-sioniste de Mohn est parfaitement évidente sur la carte. Ainsi, en partie, il voulait faire de l’ensemble du Néguev un territoire juif ayant eu l’impression, comme il le note, que la colonisation juive y était « un succès extraordinaire ». En revanche, il écrit des Bédouins : « Ils pourraient même avoir été là pendant 1000 ans sans laisser de traces ». 

On le voit dès le départ il y a eu un déséquilibre due à une vision sioniste qui méprise les Arabes la population a été précédé d’un nettoyage ethnique entre novembre 1947 et juillet 1949, environ 720.000 Arabes de Palestine fuient ou sont expulsés des territoires qui formeront Israël. « Ce sera la Nekba. Parallèlement, la loi du retour permet à tout juif de par le monde de venir en Israël et il sera interdit aux réfugiés de revenir. » La première intifada eut lieu le 9 décembre 1987. Le 28 septembre 2000 débute la seconde Intifada dite d’al-Aqsa.

Avant 1967 Jérusalem était palestinienne et personne n’empêchait les juifs de venir prier au Mur des lamentations. Après 1967 il y a cinquante ans la guerre des six jours (milkhamett sitata ayamin) en hébreu « épopée des six jours » le David israélien a terrassé le Goliath aux pieds d’argile arabe ; résultat des courses Jérusalem ouest fut occupé et la ligne verte délimite la frontière entre les deux parties de la ville. Le 22 novembre il y a aussi cinquante ans la résolution 242 demandait la restitution totale des territoires et faisait de Jérusalem une ville avec un statut particulier. En 1980 la sensibilité du sujet est tout entière résumée dans la formule : Jérusalem, ville trois fois sainte. La vieille ville de Jérusalem (la fameuse Jérusalem Est) contient à la fois le mur des Lamentations, vestige du temple d’Hérode, l’esplanade des Mosquées et le fameux Dôme du Rocher, lieu comme rapporté dans le Coran du (El Mi’radje), et le saint-sépulcre où Jésus aurait été enterré.

« Jérusalem capitale depuis 3000 ans du peuple juif » : La réalité

Aliza Bin-Noun, ambassadrice d’Israël en France, était l’invitée le 11 décembre de Jean-Pierre Elkabbach dans La Matinale d’Europe 1 a déclaré : « Jérusalem est la capitale du peuple juif depuis 3000 ans. » Une première anomalie qu’avait mis en exergue l’historien israélien Schlomo Sand : il n’y a pas de peuple juif mais une religion juive qui a puisé dans différentes ethnies. Ensuite il est à se poser la question de l’assertion israélienne concernant le fait que Jérusalem est la capitale éternelle du peuple juif.

Redouane Semar fondateur du groupe BDS Algérie qui conteste avec raison l’approche chronologique historique et religieuse des ancrages plutôt ethnique d’El Qods, « Jérusalem, écrit-il, a été une ville sainte depuis fort longtemps mais jamais la capitale de quoi que ce soit (même chez les musulmans d’ailleurs). » Shlomo Sand à bien montré que les juifs actuels sont des populations de diverses régions du monde qui se sont convertis au judaïsme, un bon nombre d’entre eux sont d’origine berbère, d’autre des slaves, d’autres des éthiopiens et il y’a même des chinois juifs. Rien ne prouve non plus que parmi les palestiniens il ne puisse pas y avoir des descendants des anciennes populations de la région qui se sont convertis au christianisme ou plus tard à l’islam.

« Les juifs ont certainement le droit de faire leur pèlerinage dans les lieux saint du judaïsme, de pratiquer leurs rites, d’adorer dieu et se lamenter face au mur si ça leur chante, mais ils n’ont aucun droit de chasser les palestiniens, les humilier et tout faire pour les amener à quitter leur villes et à se déraciner pour se faire remplacer par des étrangers, comme ils n’ont aucun droit de changer l’identité d’une ville. Le conflit palestinien est un conflit colonial et il ne faut surtout pas à mon avis tomber dans le piège de la rhétorique sioniste et ou islamiste qui veut le transformer en conflit religieux ou tomber dans le piège de la polémique historique (étant entendu d’ailleurs que l’histoire telle que racontée par les juifs est souvent écrite à partir de la bible qui ne peut être considérée comme une source historique fiable, l’exode forcé des Juifs relève plus du mythe que de la vérité historique comme l’ont si bien montré les nouveau historiens israéliens à partir de travaux d’archéologie. »

« Vérifions », poursuit l’auteur, si « Jérusalem est depuis 3.000 ans la capitale du peuple juif » :
« – 1200 av JC : Les enfants d’Israël persécutés par Le Pharaon et sauvés par Moïse refusent de rentrer dans la ville et doivent errer dans le désert pendant 40 ans

– 1000 av JC : (env.) Le Prophète David et son fils Salomon mettent en place un royaume Monothéiste. Durant quatre siècles ponctués de désobéissance aux Prophètes et de retour ponctuel au paganisme, Dieu les punit en laissant les troupes païennes envahir la ville.

– 587 av JC : Les Babyloniens prennent la ville, Nabuchodonosor détruit le temple. Les enfants d’Israël sont envoyés à Babylone où ils sont réduits en esclavage et Jérusalem est détruite.

– 517 av JC : Les perses zoroastriens prennent la ville (Cyrus sûrement monothéiste)

De – 500 av JC : Gouvernance païenne jusqu’à – 140 av JC Après la longue révolte des Maccabées, les israélites se dotent d’un état sous la dynastie des Hasmonéens

– 63 av JC : Les enfants d’Israël sont tellement divisés qu’ils demandent l’intervention des romains païens.

1 : Naissance présumée de Jésus

70 : Destruction du temple par les Romains

Domination de Rome païenne de 100 à 337 L’empire romain devient progressivement chrétien depuis la conversion de Constantin

614 : Les Perses Sassanides prennent la ville

629 : Les Romains reprennent la ville sous le commandement d’Héraclius

638 : ☪ Le Calife Omar prend la ville sans combat, la ville devient musulmane. La première mosquée de la ville y est construite.

661 : ☪ Proclamation du Califat Omeyyade, Jérusalem est une ville musulmane sous souveraineté Omeyyade

670 : Les juifs, indésirables jusqu’avant et chassés, qui furent autorisés à revenir par Omar, construisent la première synagogue de la ville

A partir de 700 : Ville musulmane sous souveraineté Omeyyade Abbasside fatimide

1099 Prise de Jérusalem par les Croisés

1187 : Saladin reprend la ville

1229 : Refondation du Royaume de Jérusalem par le traité de Jaffa

1259 : Suite à la bataille de Ayn Jalout, les Mamelouk Égyptiens se rendent maître de Jerusalem

1516 Les Ottomans sous se rendent maîtres du Proche-Orient et entrent dans Jérusalem

1917 : Après trois ans de campagnes militaires successives coalisant la France, le Royaume-Uni, leurs empires coloniaux, Allenby rentre dans Jérusalem le 18 décembre

1948 : Déclaration d’indépendance d’Israël, partition de la ville en deux, la partie Ouest sous autorité juive, la partie Est sous autorité Arabe

1967 : Invasion illégale de Jérusalem Est

2017 : Un demi-siècle après l’occupation illégale de la partie Est de la ville, les Arabes musulmans sont encore présents dans la ville, y vivent et sont plusieurs dizaines de milliers à prier chaque jour dans le troisième lieu saint de l’Islam.

Jérusalem n’est pas la capitale des enfants d’Israël qui ont refusé de rentrer dans cette ville sous Moise, ont désobéi aux Prophètes et aux Rois, ont fait rentrer les Romains païens qui au final les ont chassé ».

Les raisons de la décision de Trump

La communauté internationale n’a pas reconnu la souveraineté israélienne sur Jérusalem et considère Jérusalem-Est comme territoire occupé. Toutes les ambassades étrangères sont installées à Tel-Aviv. En 1995, le Congrès américain avait adopté le Jerusalem Embassy Act appelant les Etats-Unis à déménager l’ambassade. Mais les présidents américains avaient systématiquement repoussé son application. On peut penser que la décision du président Trump se justifie peut être de diversion et de diminution voire d’arrêt de l’enquête du Russiegate. Des personnages influents de son entourage l’ont sans doute poussé à faire ce choix. Le premier est le vice-président américain, Mike Pence, qui représente la droite chrétienne aux États-Unis. Pour les religieux Jérusalem représente un symbole messianique fort. Le deuxième personnage est Jared Kushner, gendre de Donald Trump, et juif orthodoxe. Très proche de Benyamin Netanyahou et de sa politique. Il faut y ajouter l’ambassadeur américain à Tel Aviv David Friedman farouche défenseur de la colonisation qui lors de son arrivée est allé prier au murs des lamentations. Il aurait déclaré que si Trump refusait de déclarer Jérusalem capitale éternelle d’Israël il dirigerait l’ambassade à partir de son appartement de Jérusalem. Pendant des décennies, les États-Unis ont soutenu, excusé et préservé Israël de rendre des comptes pour sa politique de nettoyage ethnique des Palestiniennes, volant notre terre pour y construire des colonies réservées aux Juifs. Même Obama qui ne s’entendait pas avec Netanyahu a été dans l’obligation d’accorder un prêt à Israël de 38 milliards de dollars sur 10 ans, la seule chose à l’actif des Etats Unis est l’abstention en décembre 2016 à une résolution demandant encore une fois l’arrêt de l’implantation de nouvelles colonies.

Pour Bruno Guigue la raison est partie de la compagne pour les présidentielles, Trump voulait rattraper son retard sur Hilary Clinton, il se lança alors dans une surenchère et comprit qu’il fallait s’adresser au lobby juif de l’Aipac qui gère en profondeur les Etats Unis : « Boudé par Wall Street Donald Trump voulait à tout prix allumer des contre-feux pour rattraper son retard. Il lui fallait obtenir des appuis auprès du lobby sioniste, Invité à l’assemblée annuelle de l’AIPAC, le 21 mars 2016, Donald Trump fait l’impossible pour faire oublier ses déclarations antérieures. (…) En vingt minutes, il dit à son auditoire ce qu’il voulait entendre et il obtient des salves d’applaudissements. Debout, en “standing ovation”. Il affirme qu’il est un “soutien de longue date et ami réel d’Israël”. Interrogé le jour même par CNN, il déclare qu’il est prêt à déplacer l’ambassade US à Jérusalem. (…) A neuf semaines du scrutin, le candidat républicain se résout à abattre sa dernière carte. C’est alors qu’il rencontre publiquement Benyamin Nétanyahou, le 26 septembre 2016. A l’issue de cette entrevue, à New York, Trump promet de reconnaître Jérusalem comme “la capitale indivisible d’Israël” et d’y installer l’ambassade américaine s’il est élu à la présidence. (…) Habiles marionnettistes, les amis de Nétanyahou ont manipulé les deux pantins désarticulés qui se disputaient un pouvoir fantoche. Nous sommes le 6 décembre 2017. Il aura mis un an à payer l’addition. En reconnaissant Jérusalem comme capitale d’Israël, en y installant leur ambassade, les USA offrent au projet d’Etat palestinien un enterrement de première classe. (…) ce geste spectaculaire trahit l’allégeance de Washington aux intérêts de l’Etat-colon. (…) Les prétentions sionistes sur la Ville sainte se réclament du texte biblique. En les accréditant, Trump réintroduit le sacré dans un conflit d’essence profane. Il percute le droit international avec le droit divin. Cette concession à la mythologie sioniste occulte la lutte de libération nationale du peuple palestinien ».

Lisez la deuxième partie de cet article



yogaesoteric

20 mars 2018 

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