Ondes : la promotion des cancers se confirmerait

 

Une fois de plus, les champs électromagnétiques issus des réseaux électriques ont été mis en cause dans la promotion du cancer. Il y a deux années, une équipe internationale menée par le Professeur Élisabeth Cardis en Espagne, à démontrer que les travailleurs exposés à des agents chimiques et des extrêmement basses fréquences (ELF). C’est au tour d’une équipe italienne qui a constaté à son tour le même effet de promotion du cancer chez l’animal exposé dans un premier temps à une radiation ionisante puis consécutivement à des ELF.

Les rats ont reçu une dose minime unique de rayon gamma en début de vie et par la suite, ont été exposés à des champs électromagnétiques tout le long de leur vie, ils ont développé à des taux inattendus des cancers de trois types différents : cancer du sein, leucémie/lymphome, et un autre type de cancer très rare appelé schwannome malin du cœur. Cette nouvelle étude, qui a été réalisée par l’institut Ramazzini de Bologne, située en Italie, fait partie de l’une des plus ambitieuses études animales jamais réalisées. Les futurs rapports du même groupe scientifique vont décrire les actions des champs électromagnétiques combinées avec d’autres agents cancérogènes, spécialement les formaldéhydes et les aflatoxines, ajoutés aux champs électromagnétiques seuls. L’ensemble de ces expérimentations ont nécessité plus de 10.000 rats et a coûté près de 5 millions d’euros. L’étude sur les ondes et les rayons gamma a impliqué plus de 650 rats exposés et 1001 rats pour le groupe témoin.

« Nous avons confirmé les résultats d’une ancienne étude épidémiologique réalisée par les professeurs Milham, Wertheimer et Matanoski, qui avaient observé une augmentation du risque de lymphome et de leucémie et de cancer du sein, tout comme dans la plus récente étude menée par le professeur Cardis » a déclaré Morando Soffritti, le directeur du projet, dans une interview avec Microwave News. Le docteur Soffritti se réfère aux pionniers dans le domaine, les professeurs Sam Milham, Nancy Wertheimer et Geneviève Matanoski qui ont travaillé sur le sujet entre 1979 et les années 90.

Les champs magnétiques peuvent « augmenter les effets de certains cancérogènes bien connus » a déclaré Firoella Belpoggi, le directeur scientifique de l’institut, dans un échange de mails. Le docteur Soffritti, l’ancien directeur scientifique, a travaillé sur ce sujet mais aussi sur d’autres projets. Ses travaux ont été publiés dans la revue « international journal of Radiation Biology » et sont disponibles sur le site web de cette revue. Les chercheurs de Ramazzini ne mâchent pas leurs mots sur les implications de ces nouvelles découvertes. Dans la partie « conclusions » du résumé de l’étude, ils ont juste écrit une phrase: « ces résultats montrent la nécessité de réévaluer les normes de sécurité des radiations non ionisantes »


Les résultats de cette étude animale « tendent à conforter les récentes découvertes entre les ELF et les risques de tumeurs aux cerveaux » a déclaré le professeur Cardis du centre de recherche en épidémiologie environnementale (CREAL) à Barcelone. Son projet, aussi connu sous le nom de l’étude INTEROCC, a investigué la corrélation entre l’exposition des travailleurs exposés à des agents chimiques et aux champs électromagnétiques. (voir le rapport (EN) : Promotion du cancer par les EMF : Une vielle idée qui fait son grand retour). Le docteur Soffritti n’a pas souhaité décrire en détail leurs constations lors de l’expérimentation animal entre les champs électromagnétiques et les formaldéhydes, indiquant seulement qu’ils ont trouvé « des résultats assez intéressants concernant la santé publique » et une publication a été soumise à une revue évaluée par des pairs. Plusieurs autres publications et une analyse sont dans les tuyaux.

L’expérience de Ramazzini

L’équipe de Ramazzini à suivi le protocole promotion-initiation couramment employé. Des rats du type Sprague-Dawley, mâle et femelle, ont été exposés dans le ventre de leurs mères, et le reste de leur vie à un champ électromagnétique de 50Hz à une intensité allant de 20μT (micro-Tesla) à 1000μT (200 milligauss ou 10 Gauss). À l’âge de 6 semaines, ils ont tous reçu une dose unique de rayon gamma de 0.1Gy, connu comme étant un agent cancérogène. (C’est à peu de chose près ce que l’on reçoit quand on fait un scanner exposition qui n’est donc pas inhabituelle).

Voici les résultats clés des propres propos des chercheurs :
(a) Une augmentation significative, en corrélation avec les doses reçues, des adénocarcinome mammaire (cancer du sein) chez les mâles et les femelles, en particulier chez les mâles exposés à 20μT et à 0.1Gy et chez les femelles exposées à 1000μT en plus de 0.1 Gy.
(b) Une augmentation significative, en corrélation avec les doses reçues, des schwannomas malin avec une augmentation significative chez les mâles exposés à 20μT en plus du rayonnent gamma à une dose de 0.1Gy [significatif statistiquement] et à 1000μT en plus du rayonnement gamma.
(c) Une augmentation significative des neoplasias hematopoietic [leucémie et lymphome] chez les mâles à 1000μT en plus du rayonnement gamma

L’équipe italienne a été surprise de l’ampleur des cancers du sein chez les rats mâles. « Par rapport aux historiques de contrôle, les cancer du sein chez les mâles sont très rares ». Le lien entre les champs électromagnétiques et le cancer du sein chez les hommes a été en premier décrit par le professeur Matanoski de l’université John Hopkins, il y a plus de 25 ans. D’autres plus tard ont reporté les mêmes résultats. Une méta-analyse de 10 études sur les cancers du sein chez l’homme et confirme cette association avec les champs électromagnétiques. Les membres de l’establishment dans le domaine des champs électromagnétiques ont contesté l’hypothèse du lien entre les cancers du sein et ces champs électromagnétiques, que ça soit chez l’homme ou chez la femme. La plus grande critique provient du professeur Maria Feychting de l’institut Karolinska qui est la vice-présidente de l’ICNIRP (entité à l’origine des normes européennes). Elle a appelé pour une fin de ce type de recherches (cf EN: un cri d’orfraie pour stopper la rechercher dans les EMF). L’ICNIRP n’a jamais accepté la possibilité qu’il y ait un quelconque risque de cancer, que ça soit pour le sein, le cerveau ou le sang, lié aux champs électromagnétiques ou aux radiofréquences.

Une histoire sordide entre les EMF et le NIEHS


Les confirmations de l’hypothèse que les EMF peuvent promouvoir le cancer du sein chez l’animal sont le dernier chapitre d’un long périple qui a commencé entre l’institut national en science de la santé environnementale (NIEHS) contre le groupe de recherche de l’école de médecine vétérinaire à Hanovre, en Allemagne. l’équipe allemande, menée par les professeurs Wolfgang Löscher et Meike Mevissen, ont réalisé plusieurs séries d’expérimentations animales dans les années 90 qui ont démontré que les EMF pouvaient promouvoir le cancer du sein chez les animaux qui ont été en contact avec du Dimethylbenz[a]anthracene, un cancérogène chimique (se référer à l’article (EN) : Löscher a encore trouvé que les EMF peuvent promouvoir le cancer du sein). Quand l’équipe financée par le NIEHS a été dans l’incapacité de répliquer l’expérience, un officiel du NIEHS, Gary Boorman, a lancé une campagne de discrédit contre les chercheurs allemands. Plus tard, Gary Boorman a été sanctionné disciplinairement et le NIEHS s’est excusé formellement (Pour plus d’info, voir « c’est génétiques, imbécile »). Néanmoins, le NIEHS tout comme l’ICNIRP n’ont toujours pas pris en compte le risque de cancer lié aux EMF.

Après avoir pris connaissance des résultats de Ramazzini, on a contacté le scientifique nommé Mevissen, qui est un professeur en pharmacologie vétérinaire et en toxicologie à l’université de Berne en Suisse, pour avoir son avis. « Cette nouvelle étude indique que les ELF et les EMF peuvent promouvoir le cancer du sein ». « Ceci et les résultats sur la leucémie contribuent a ajouté des nouvelles pièces au puzzle qui confirme la décision du CIRC en 2001 que les EMF et les ELF sont de possibles cancérogènes. » Le professeur Mevissen était un des membres du panel du CIRC qui ont classifié les champs électromagnétiques issus du courant électrique comme possiblement cancérogène (voir MWN, J/A01, p.1). Le docteur Soffritti était au meeting de Lyon en tant qu’observateur.

Pas de cancer identifié avec les seuls EMF

Dans une interview, le professeur Belpoggi a indiqué qu’il prévoyait de publier les résultats d’une expérimentation concurrente dans laquelle les rats exposés à des fréquences du courant électrique, avec aucune autre exposition. « Les données préliminaires de notre expérimentation, les ELF seules ne montrent pas une augmentation significative de cancer en expérimentation animale jusqu’à maintenant ». « Le principal résultat de notre expérimentation »est que « les champs électromagnétiques d’extrêmement basse fréquence ont un effet synergique : Ils ont le pouvoir d’augmenter les effets d’agents cancérogènes à de petites doses alors que seul, les résultats sont négatifs à des doses identiques. » Le professeur Belpoggi, a indiqué que pour le moment, elle préfère le terme « augmentation » que « promotion » car « nous ne connaissons pas le mécanisme d’action ». Elle a ajouté que, « son équipe était prête à donner le matériel biologique congelé et les blocs de paraffine à des laboratoires compétents pour des études sur cet effet synergique ».

Vie entière contre 2 ans d’exposition


On a demandé au professeur Belpoggi pourquoi l’étude de Ramazzini a trouvé des effets provoqués par des champs électromagnétiques sur le développement des cancers quand des études similaires coordonnées par le NIEHS et le docteur Boorman durant les années 90 ne l’ont pas trouvé. « La différence est basique », l’équipe de Ramazzini a exposé les rats tout le long de leur vie quant à la NIEHS, elle l’a fait seulement pendant 2 ans. (A noter que l’expérimentation du docteur Boorman EMF-DMBA a été encore plus courte, elle avait duré entre 13 et 26 semaines.)

« Nous avons oublié quelque chose qui allait de soi » a expliqué Fiorella Belpoggi : « Quand nous avons commencé dans les années 1970, la carcinogenèse expérimentale était le principal outil pour les études d’exposition, et les expositions commençaient à l’âge adulte et finissaient aux deux tiers de la vie, ce qui correspondait à 60 ans chez l’homme, et 104 semaines chez les animaux. La logique pour les carcinogenèses industrielles en laboratoire animal est assez différente des carcinogenèses dans le secteur environnementale, ce qui se concrétise par des doses faibles mais tout le long de la vie, commençant dès la gestation. C’est crucial et c’est la raison que nous utilisons l’exposition à long terme. »
 
On a posé la même question à Sam Milham. Il est aussi en faveur d’une exposition sur la durée. « A cause de la longue latence dans la plupart des cancers, les études de l’exposition à long terme montrent plus de mortalité après le milieu de la vie. Ce qui rend les études à long terme supérieures à celles de plus courte durée, » a-t-elle déclaré.

En 1998, quand les premiers résultats de l’expérimentation animale de Boorman-NTP sont arrivés, le docteur Soffritti et son mentor, Cesar Maltoni, ont écrit au programme national de toxicologie (NTP) arguant que l’expérimentation avait été mise à terme trop tôt et se questionnant sur la qualité du design de l’étude. « c’est notre conviction, ce bio-essai était planifié et conduit avec un protocole qui ne pouvait se conclure uniquement par des résultats négatifs sur le 60Hz et la carcinogenèse. ».

Est-ce que l’étude de 25 million de dollars du NTP a utilisé une exposition à vie ?

Le groupe de Ramazzini a réalisé un projet similaire avec les radiations de type radiofréquence. Encore une fois, il s’agit d’une étude sur une exposition au court de la vie entière. Les résultats ont été disponibles au cours de l’année 2017. Les études de Ramazzini utilisent pour son exposition un signal éloigné pour imiter une exposition aux antennes-relais plutôt que les téléphones portables. Le NTP a lui aussi le sien en cours, et assez en retard, c’est un projet sur les radiations du téléphone portable dont le montant est de 25 millions de dollars et là encore, le NTP a mis un terme l’exposition au bout de deux ans, même si Ron Melnick, le designer du protocole, voulait une exposition à vie. Il a été bypassé sur ce point à la dernière minute.

On s’est tourné vers Chris Portier, qui a pris la décision d’arrêter l’exposition après deux ans : « Est-ce que vous avez des regrets après avoir lu les nouveaux articles de Ramazzini ? » « Aucun » il a répondu. « Cette étude confirme cette décision, cela ne la réfute pas. » (Portier a indiqué que John Bucher, qui l’a remplacé à la tête du NTP, a pris la décision finale de limiter les expositions dans les études à deux ans.)

On a montré un graphique provenant de la publication de Ramazzini montrant la prévalence des cancers du sein chez les rats femelles qui continuent d’accroître après les deux ans d’exposition (La 104ème semaine, indiquée par la ligne rouge, voir ci-dessous)

 

Incidence cumulée de tumeurs du sein au cours de la vie des rats femelles (en semaine)
Figure 7 de l’étude de Ramazzini avec l’ajout d’une ligne rouge indiquant les 104 semaines cumulées

Chris Portier répliqua que ces tumeurs tardives auraient été certainement trouvées à la fin de l’étude au bout des deux ans et lorsqu’ils seront disséqués et les organes examinés

L’histoire se répète avec le NTP et le NIEHS

Il y a encore un parallèle inquiétant avec le projet du NTP sur les études animales et les ondes. En 1995, quand l’étude animale du NTP, alors qu’elle était toujours en cours et qu’il n’y avait pas de résultat à l’horizon, le docteur Boorman a donné une conférence de presse dans laquelle il a indiqué que c’était « admis » pour lui qu’il n’y avait rien à voir sur le sujet, que les EMF n’ont pas d’effet sur le développement des cancers. En 2010, quand l’étude animale du NTP était encore qu’à ses débuts, le professeur John Bucher, le manager du NIEHS en charge du projet, a indiqué à la presse locale qu’il ne croyait pas que les téléphones portables pouvaient causer des cancers, alors pourquoi dépensé 25 millions de dollars pour y répondre. (Le NIEHS comprendra-t-il un jour les EMF?)

Pour plus d’information sur l’étude concernant les radiofréquences du NTP et du NIEHS, particulièrement sur le modus operandi, voir ce rapport.

yogaesoteric
15 juillet 2018

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